Le pilotage par la qualité dans l’enseignement supérieur
La nouvelle loi fédérale sur l’encouragement et la coordination des hautes écoles (LEHE), entrée en vigueur le 1er janvier 2015, prévoit une accréditation institutionnelle pour les hautes écoles qui souhaitent obtenir ou conserver leur droit à l’appellation «haute école universitaire», «haute école spécialisée» ou «haute école pédagogique» et recevoir des subventions fédérales.
L’enjeu pour la HES-SO Haute école spécialisée de Suisse occidentale, comme pour toutes les hautes écoles reconnues selon les anciennes bases légales, est majeur. Il en va de la confir-mation du positionnement de l’institution dans le paysage de l’enseignement supérieur suisse de niveau tertiaire A.
Obligation du système qualité
L’accréditation institutionnelle représente un accord entre la Confédération et les hautes écoles qui sont responsables de la qualité de leur enseignement, de leur recherche et de leurs prestations de services et qui doivent dé-sormais démontrer qu’elles ont mis en place les mécanismes nécessaires – un système qua-lité – pour assurer et développer à long terme la qualité de leurs missions.
L’accréditation n’évalue pas la qualité des activités de la haute école, mais bien le sys-tème que celle-ci a mis en place pour s’assurer de la qualité de ses activités (1). Les pouvoirs publics financent les hautes écoles en leur con-férant une importante autonomie; celles-ci doivent en échange rendre des comptes, no-tamment sur la qualité de leurs missions.
Formation des personnes comme «produit»
La notion de qualité dans le monde de l’enseignement supérieur est multidimensi-onnelle et sa vérification, ou son évaluation, doit pouvoir rendre compte de la particularité du secteur et des spécificités de chaque institu-tion. Les hautes écoles forment des personnes
- et non des produits ou des machines – et ont pour mission, selon le Conseil de l’Europe (2): –– la préparation à un emploi durable ;
- la préparation à une vie de citoyens actifs dans des sociétés démocratiques ;
- le développement personnel ;
- le développement et la consolidation, par l’enseignement, l’apprentissage et la recher-che, d’une base de connaissances approfon-dies et diversifiées.
L’approche qualité est donc moins normative que celle qui prévaut dans l’industrie et intègre dans une vision globale, en plus des aspects académiques et de gouvernance, des éléments tels que la participation des différentes parties prenantes, la durabilité ou encore l’égalité des chances. Les standards nationaux de qualité, comme leur équivalent européen (3), sont aussi assez génériques pour permettre à chaque hau-te école de faire valoir ses particularités ; le profil de l’institution étant pris en compte dans la constitution du groupe d’experts évaluateurs.
Asymétrique, diversifié et décentralisé
La HES-SO elle-même, avec les vingt-huit hautes écoles qui la composent, réparties sur tout le territoire de la Suisse occidentale, et ses sept cantons de tutelle, est une institution multidimensionnelle. Le système qualité de la HES-SO se doit d’être à l’image de l’institution: asymétrique, diversifié et décentralisé.
Asymétrique, car l’approche diffère se-lon les missions ; diversifié et décentralisé, car composé d’une mosaïque de systèmes locaux. La qualité est vue dans un sens générique com-me la réalisation des objectifs que l’on s’est fixés dans le cadre d’une mission et de choix stratégiques, en tenant compte des spécifici-tés, du contexte, et des moyens disponibles.
Le système qualité se veut ainsi souple, pragmatique, porteur de sens et adapté à la réalité de chacune des composantes qui forment l’institution. Il se fonde sur les principes suivants : amélioration continue, pertinence, proportionnalité, cohérence, continuité, mosaïque, participation et transparence. Il couvre les missions principales de l’institution: enseignement, recherche appliquée et développement (Ra&D), prestations de services et politiques institutionnelles (gouvernance) qui soutiennent les missions académiques.
Evaluation formelle
Pour la mission Enseignement – mission phare de la HES-SO –, le Rectorat a mis en place, pour toutes les hautes écoles, une évaluation for-melle de toutes les filières d’études de niveau Bachelor et Master sur la base de critères de qualité couvrant les questions du profil / de la cohérence de la filière, de son architecture, des conditions cadres et de l’assurance qualité.
La démarche qualité pour la mission Ra&D – davantage ancrée dans les hautes écoles –, est harmonisée pour toute la HES-SO mais de manière moins formelle que l’évaluation des filières d’études. En phase pi-lote actuellement, elle s’articule autour de questions clés liées notamment aux objectifs stratégiques, aux ressources, à l’intégrité académique ou à l’accès et à la valorisation des résultats. L’approche vise les conditions cadres et non l’évaluation des résultats de la recherche, ceux-ci étant évalués par les pairs, comme c’est l’usage. L’objectif premier de la démarche est de recueillir à l’intention des chercheurs et des responsables de domaines (équivalents des doyens de faculté dans le monde universitaire) un avis d’expertise ex-terne en vue d’une amélioration continue. L’évaluation des prestations de services – fortement ancrées dans les hautes écoles – reste encore à développer. Les démarches qualité relatives aux politiques institution-nelles et aux services de soutien aux missions académiques sont développées au niveau des directions générales cantonales/régionales, des hautes écoles elles-mêmes ou du Recto-rat, chaque composante ayant mis en place le système qui lui convient le mieux (plusieurs utilisent la norme ISO 9001 :2015).
Communiquer les microsystèmes qualité
Quantité de démarches sont par ailleurs mises en place dans les diverses composantes de la HES-SO en lien avec les missions principales de l’institution pour répondre aux activités cou-rantes et aux réalités locales. La diversité et la ri-chesse de ces actions sont documentées à l’aide du reporting qualité, un outil simple et pragma-tique permettant de faire remonter les informa-tions sur cette mosaïque de démarches qualité et de faire communiquer entre eux ces micro-systèmes qualité, d’assurer leur visibilité, et de favoriser l’échange de pratiques éprouvées.
Ce pilotage par la qualité vient compléter le pilotage stratégique, opérationnel et financier de la HES-SO en permettant, grâce à un ensem-ble complet, cohérent et dynamique de démar-ches, de documenter, d’évaluer et de maintenir ou d’améliorer la qualité des activités de la hau-te école et/ou d’accompagner son adaptation aux évolutions de son environnement.
Evolution constante
Le système qualité de la HES-SO, encore en construction et en constante évolution, couvre essentiellement les missions académiques. Le développement du système qualité participe aux actions et mesures prises jour après jour par le Rectorat et l’ensemble des composantes de l’institution pour renforcer le positionne-ment de la HES-SO dans le monde de l’enseignement supérieur qui prépare nos jeu-nes à un emploi durable et développe, consoli-de, par l’enseignement, l’apprentissage et la recherche, une base de connaissances appro-fondies et diversifiées.
Les exigences nationales en termes de qualité pour les hautes écoles ouvrent la porte aux dimensions plus sociétales de nos institu-tions soulignées par le Conseil de l’Europe. Vi-endra bientôt le jour où les systèmes qualité intégreront davantage ces éléments : un beau
projet et un beau défi en perspective.